Plus content qu aucun des sept sages.
005 Son voisin au contraire, étant tout cousu d or,
Chantait peu, dormait moins encor.
C était un homme de finance.
Si sur le point du jour parfois il sommeillait,
Le Savetier alors en chantant l éveillait,
010 Et le Financier se plaignait,
Que les soins de la Providence
N eussent pas au marché fait vendre le dormir,
Comme le manger et le boire.
En son hôtel il fait venir
015 Le chanteur, et lui dit : Or çà, sire Grégoire,
Que gagnez-vous par an ? - Par an ? Ma foi, Monsieur,
Dit avec un ton de rieur,
Le gaillard Savetier, ce n est point ma manière
De compter de la sorte ; et je n entasse guère
020 Un jour sur l autre : il suffit qu à la fin
J attrape le bout de l année :
Chaque jour amène son pain.
- Eh bien que gagnez-vous, dites-moi, par journée ?
- Tantôt plus, tantôt moins : le mal est que toujours ;
025 (Et sans cela nos gains seraient assez honnêtes,)
Le mal est que dans l an s entremêlent des jours
Qu il faut chommer ; on nous ruine en Fêtes.
L une fait tort à l autre ; et Monsieur le Curé
De quelque nouveau Saint charge toujours son prône.
030 Le Financier riant de sa naïveté
Lui dit : Je vous veux mettre aujourd hui sur le trône.
Prenez ces cent écus : gardez-les avec soin,
Pour vous en servir au besoin.
Le Savetier crut voir tout l argent que la terre
035 Avait depuis plus de cent ans